Par Julie Gedeon

L’équipe dynamique et novatrice de TOWT mise avoir le vent dans les voiles

Regard européen

Dès cet été, le groupe TransOceanic Wind Transport (TOWT) prévoit la mise en service du premier de ses cargos à voile entre les ports du Havre (où la société est basée) et de New York.

Le navire Anemos (du mot grec qui signifie vent) est le premier de deux nouveaux navires de 5 000 tonnes qui seront mis à l’eau cette année. La société prévoit en construire un nouveau tous les trois mois jusqu’à une flotte d’une trentaine de navires d’ici 2030, avec comme objectif d’en avoir deux cents d’ici 2035.

« Nous venons de conclure la commande de six navires supplémentaires, explique le fondateur et directeur général, Guillaume Le Grand. On prévoit aussi de construire des navires de classe Panamax avec des voiles, au service dans le canal de Panama vers l’Asie. »

Conçu et construit par le chantier naval français PIRIOU, ce cargo à voile de 81 mètres pourra transporter jusqu’à 1 100 tonnes en une seule traversée océanique grâce à l’énergie éolienne, réduisant ainsi de plus de 90 % les émissions de carbone par rapport à la même traversée à propulsion traditionnelle.

L’Anemos pourra naviguer 320 jours par année et sera principalement propulsé grâce à une voile suspendue entre deux mâts connectés au même gréement, le tout contrôlé électriquement sans ligne ni treuil. « Ces voiles ont une puissance incroyable par rapport à leur surface, explique M. Le Grand. Nous pouvons naviguer nez au vent à près de 40 degrés, mais ce sont surtout les vents au largue (trois quarts arrière) dont nous tirons le meilleur parti, car c’est le moyen le plus efficace et le plus sûr d’atteindre de 10 à 12 nœuds. »

Ce n’est pas une course, mais nous offrons un horaire fiable et prévisible de 13 jours reliant Le Havre à New York par exemple, et de 8 jours entre New York et Santa Marta, en Colombie

Guillaume Le Grand, TOWT

« Nous espérons gagner du temps en ayant notre portique sur mesure et notre propre système de chargement-déchargement, ce qui nous donne une autonomie pour la manutention à quai, » , ajoute-t-il.

À bord, les systèmes avancés de routage optimiseront l’utilisation du vent disponible. Les navires seront également équipés de deux moteurs turbo à quatre temps, qui peuvent être utilisés individuellement ou conjointement à différents niveaux de puissance.

Le terme Anemos est également le nom de la seule certification actuellement disponible à l’échelle mondiale garantissant la navigation sans carbone grâce à des voiliers affrétés à la livraison de marchandises. « La confirmation du label par une tierce partie est un excellent moyen de bonifier la valeur et le caractère distinctif des produits livrés de cette manière, explique M. Le Grand.

« Et c’est pour ces mêmes raisons que j’apprécie le programme Green Marine Europe : transparence et vérification indépendante. » TOWT a adhéré en tant que participant de Green Marine Europe en 2022, avant même que son premier navire ne soit mis à l’eau.

Depuis 2011, le groupe TOWT montre concrètement les avantages environnementaux de l’énergie éolienne grâce à l’exploitation réussie de voiliers affrétés pour des livraisons de marchandises sans carbone dans le golfe de Gascogne, la Manche et l’océan Atlantique.

Beaucoup de gens nous prenaient pour des fous lorsque nous avons commencé, rappelle M. Le Grand. Aujourd’hui, on se rend mieux compte de la pression que subit le secteur du transport maritime pour la décarbonation.

Guillaume Le Grand

M. Le Grand souligne que l’Union européenne s’est fixé comme objectif d’éliminer 90 % de sa pollution nette liée aux gaz à effet de serre d’ici 2040 par rapport aux niveaux de 1990, afin de devenir le premier continent neutre sur le plan climatique.

À partir de 2025, les navires opérant dans l’Espace économique européen, qui englobe tous les pays de l’Union européenne ainsi que l’Islande, le Liechtenstein et la Norvège, devront se conformer à un certain plafond d’intensité moyenne annuelle de GES pour l’énergie à bord, qui inclura les émissions de gaz à effet de serre de tous les combustibles utilisés.

Cette moyenne annuelle est mesurée en émissions de GES par unité d’énergie (gCO2e/MJ). Les exigences en matière d’intensité des GES sont exprimées en pourcentage de réduction. Ce taux devra commencer à 2 % en 2025 et augmentera ensuite tous les cinq ans, comme l’indique ce tableau :

Le règlement contient des dispositions relatives à l’octroi de crédits pour les navires à propulsion éolienne.

Dans le but de se doter progressivement d’une flotte de voiliers et d’élargir ses services de transport sans carbone, le groupe TOWT a déjà organisé son calendrier et signé des ententes avec des clients jusqu’en 2026, alors que la ville de Québec figurera aussi parmi les itinéraires ralliant Le Havre ainsi que Santa Marta. « Nous proposons des tarifs abordables, et nous pourrons garantir les prix sur plusieurs années, car nous ne serons pas tributaires du coefficient d’ajustement de soutage, qui suit la fluctuation des prix du carburant. »

La société TOWT a déjà conclu des contrats à long terme pour la livraison de fèves de cacao, de café, de sucre, de confiture et d’autres produits. « En plus du transport sans émissions, nos navires proposent aussi un environnement avantageux, car il est préférable de maintenir certains de ces produits à environ un ou deux degrés par rapport à la température océanique, plutôt que de les laisser surchauffer – voire carrément griller – dans des conteneurs sous le soleil, sans compter le refroidissement excessif la nuit, ajoute-t-il. Nous pouvons aussi aérer naturellement la cale environ 30 fois par heure, ce qui est un autre moyen d’empêcher toute forme de maturation des aliments ou de fermentation des boissons. »

Bien que le navire soit principalement destiné au transport de palettes, il dispose également d’un espace de cargaison pour des tonneaux, ce qui permet de favoriser le vieillissement du vin ou du cognac dans un environnement certifié pendant sa livraison. « Nous pouvons contrôler la température des tonneaux sur une base horaire tout au long du voyage », explique M. Le Grand.

La fabrication du deuxième navire, Artemis, s’achève actuellement au Vietnam, et il devrait appareiller pour la France après la phase d’essais en mer durant l’été. M. Le Grand reconnaît que chaque navire de TOWT transporte un volume de marchandises inférieur par rapport à la capacité des autres navires.

Par contre, nos navires offrent une solution immédiate pour la décarbonation sans conséquences imprévues, et qui peut être multipliée à grande échelle pour tirer parti de la disponibilité illimitée du vent. Ça peut faire une différence de taille pour transformer un problème en occasion...

Guillaume Le Grand

TOWT, en images

Visionnez la conception du cargo à voile de TOWT en animation 3D.

Voyez la mise à l’eau de l’Anemos.

Faites une visite virtuelle à bord de l’Artemis dont la construction s’achève au Vietnam.

Retour en vidéo sur le mâtage et l'haubanage de l'Anemos.